Madame, Monsieur,
Nous revenons vers
vous une nouvelle fois, inquiets pour l’avenir des salariés des Caisses
régionales tant dans les réseaux que dans les sièges.
Nous vous avons
interpellés à maintes reprises depuis le tournant que représente l’introduction
en Bourse de Crédit Agricole SA (CASA), à laquelle nous étions fortement
opposés alors que vous consentiez aussi, en qualité de représentant des
sociétaires du Crédit Agricole Coopératif Mutuel, au développement externe
(LCL, FINAREF, etc.) et à l’international, avec entre autres EMPORIKI,
CARIPARMA, ainsi qu’au développement d’activités de marchés spéculatives pour
lesquelles le Crédit Agricole n’avait, et c’est bien normal, ni l’expérience,
ni les compétences, ni la maîtrise
nécessaire… Cette stratégie de développement capitalistique n’avait pas
davantage recueilli notre assentiment et le passé récent nous a donné raison
avec autour de 27 milliards engloutis – soit l’équivalent de 11 années de masse
salariale pour 66 000 salariés. Si les Caisses régionales du CA ont pu
supporter ces pertes c’est grâce à la richesse produite en amont par le travail
des salariés et la confiance des usagers et sociétaires.
Souvent CASA est dénoncé comme responsable de ces dérives successives. Pourtant la gouvernance de notre système hybride repose entièrement sur les Conseils d’Administration des Caisses régionales. Il n’est plus l’heure de chercher des coupables aux pertes déjà enregistrées mais il vous revient la responsabilité de ne plus vous laisser imposer les solutions toutes faites que vous présentent depuis des années les technocrates au service des marchés.
Jusqu’ici vous
n’avez pas su nous entendre. Aujourd’hui, à l’heure où la banque digitale
avance à grands pas avec la mise en place du Système d’Information Unique, les
sièges des Caisses régionales sont exposés à la multiplication des coopérations
sous couvert d’une mutualisation de moyens. Les réseaux sont menacés par une
transformation du maillage des agences qui privera certains de nos cantons et
de nos communes d’une proximité à l’origine de notre histoire. Ainsi, la Caisse
pilote d’Ile de France s’est déjà engagée dans la suppression d’une
cinquantaine d’agences, d’autres Caisses régionales (CAP, CMDS, Normandie …)
ont fait et continuent à faire le choix de délocaliser les activités de leurs
sièges en sacrifiant les sites d’origine, des emplois, les conditions de vie
des salariés, sans aucun égard pour l’économie locale et les usagers des
territoires sacrifiés. Pourtant la réhabilitation des sièges in situ est citée
en exemple par l’observatoire de la FNCA qui affiche la volonté de préserver
les conditions de travail des salariés.
Les arguments qui vous sont exposés pour
justifier ces choix sont :
-
la
modification des habitudes de nos clients,
-
une
concurrence exacerbée,
-
des
contraintes réglementaires,
-
la
nécessité de s’adapter aux évolutions de la société pour la pérennité de
l’entreprise.
Ces mêmes arguments ont déjà été utilisés
pour justifier les choix précédents avec toutes les conséquences que
nous pouvons aujourd’hui constater :
-
pertes
financières,
-
pertes
de parts de marchés,
-
perte
de confiance des clients,
-
mal
être des salariés.
En revanche, vous
pouvez vous féliciter d’avoir décroché le meilleur coefficient qui porte si
bien son nom : le coefficient d’exploitation … dans une entreprise
aux statuts coopératifs mutualistes qui se targue publiquement de mettre les
Hommes au centre de ses préoccupations, c’est quand même bien un comble !
Il nous semble urgent d’entendre les revendications portées par
la CGT à savoir :
- reconquérir
notre autonomie vis-à-vis des marchés financiers en privilégiant l’épargne
Bilan et en stoppant la titrisation (ou cessions des crédits sortis du
bilan),
- maintenir, sur
nos territoires actuels, la proximité du service à la clientèle par le
développement des emplois dans toutes nos agences,
- préserver la
spécificité régionale en conservant les sièges implantés sur les sites
actuels avec les femmes et les hommes au service de leur réseau local.
La CGT, comme vous,
n’est pas opposée à l’évolution des nouvelles technologies.
Contrairement aux capitalistes, nous, entreprise
mutualiste coopérative, attentive au bien être des Hommes, devons utiliser ces
évolutions pour servir les intérêts des usagers, des sociétaires et des
salariés.
La pérennité du Coopératif Mutuel
nécessitera à terme l’abandon du système hybride actuel pour aller vers une
renationalisation de l’organe central, inscrite dans un pôle public bancaire,
sous contrôle des pouvoirs publics mais aussi des salariés et des usagers de la
Banque.
La CGT en appelle à
votre sens des responsabilités pour imposer d’ores et déjà l’arrêt immédiat des projets de
restructuration, coopération, réorganisation, redéploiement, fermeture
d’agences et de services en cours et à venir. Nous vous demandons de vous
engager au développement des emplois et des salaires pour au moins les dix
prochaines années. Cet engagement social n’est pas surréaliste au regard des
3.5 milliards d'euros de résultats annuels dégagés ces dernières années par les
seules Caisses régionales, comparés à la stagnation des 2,5 milliards
d'euros de masse salariale. Votre choix de maîtriser la masse salariale a eu
pour conséquence la détérioration continuelle des conditions de travail et de
vie des salariés. La seule inversion de ces deux chiffres permettrait de créer
15 000 emplois supplémentaires qui soulageraient grandement des conditions
de travail devenues insupportables et d’augmenter les salaires de 600 € brut
sur 13 mois pour l’ensemble des salariés des Caisses régionales et filiales: il
resterait encore 2,5 milliards d'euros à distribuer en intérêts de parts
sociales et à engranger pour améliorer nos fonds propres et développer notre
activité.
Les sociétaires, les
usagers, les salariés et la CGT du Crédit Agricole Mutuel attendent de vous que vous
agissiez dans le cadre des mandats qui vous sont confiés de manière à satisfaire
les intérêts collectifs
et réciproques
de chacun.