samedi 24 juin 2017

Banques. Pourquoi les effectifs continuent de baisser ?

 
Elles emploient 370 300 personnes, soit 7 000 de moins qu’en 2012. L’an dernier, les effectifs dans les banques se sont encore repliés de 0,3 %. En cause, la digitalisation de l’économie, qui entraîne des fermetures d’agences.
Entretien avec Régis Dos Santos, président national du SNB (Syndicat national de la banque et du crédit).

Comment expliquer la diminution des effectifs dans la banque depuis plusieurs années ?

Elle s’explique par la digitalisation de l’économie. Aujourd’hui, quelle que soit l’heure ou le jour, il suffit d’aller sur internet pour trouver en quelques clics l’essentiel des réponses. Si bien que les clients fréquentent de moins en moins les agences. Et les réseaux traditionnels sont confrontés à la concurrence des banques en ligne. D’où la diminution du nombre d’agences, donc des emplois.

Comment les salariés le vivent-ils ?
Très mal, même s’ils comprennent les raisons économiques qui conduisent les banques à ces réductions d’effectifs. Passer de six agences à trois dans un secteur géographique ne réduit pas la charge de travail des salariés. On le voit bien dans notre troisième enquête sur les risques psychosociaux, publiée début 2017.
Le stress, la souffrance au travail les phénomènes de burn-out s’accroissent, même si on ne s’en rend pas forcément compte quand on pénètre dans une agence bancaire à l’ambiance calme et feutrée.

Moins de clients dans les agences ne veut pas dire moins de travail ?
Non. Ce qui a diminué, c’est le nombre de rendez-vous nécessaires pour un projet d’emprunt par exemple. Il y a 25 ans, quand un client venait pour un projet d’achat de maison, il avait très peu d’informations au départ. Il fallait plusieurs rendez-vous pour ramener les documents demandés, évaluer la capacité de remboursement…
Aujourd’hui, avant de venir, le client s’est renseigné sur internet. Il a consulté un simulateur de taux. Il sait combien il peut emprunter, il a déjà préparé ses justificatifs de revenus. Cependant, l’élaboration du dossier de crédit demande, elle, toujours autant de temps aux salariés. Et les banques les incitent à vendre toujours plus de produits. Donc à prendre des rendez-vous avec d’autres clients.

Que demandez-vous ?
D’abord qu’on laisse nos collègues conseillers clientèle faire leur métier. C’est-à-dire écouter le client, lui vendre le produit adapté. De leur côté, les banques leur demandent d’abord de vendre les produits qui intéressent l’entreprise, même si ça doit être parfois au détriment du client.

La part des cadres dans les banques augmente au détriment des effectifs dans les agences ?
Oui. La concurrence des géants américains de l’internet s’intensifie. Les banques recrutent des informaticiens de haut niveau. Mais aussi des juristes et des spécialistes de la comptabilité pour s’adapter à l’évolution de la réglementation européenne : lutte contre le blanchiment, l’évasion fiscale…
C’est la raison pour laquelle on lance un appel au patronat bancaire afin qu’il engage un plan Marshall de la formation professionnelle. Les conseillers clientèle sont généralistes. Il faut les former afin qu’ils occupent certains de ces postes d’experts. En attendant, beaucoup sont inquiets. Notre enquête montre que 37 % des salariés des banques s’inquiètent pour la pérennité de leur emploi. Ils étaient 20 % en 2014.

Article paru le 16/06 sur Ouest France
http://www.ouest-france.fr/economie/banques-finance/banques-pourquoi-les-effectifs-continuent-de-baisser-5067266